Clause d’agrément : objet et domaine pour les cessions de titres

    Clause d’agrément : objet et domaine pour les cessions de titres

    23/09/2020 142 Aucun commentaire

    Objet de l’agrément

     

    L’agrément permet de contrôler l’entrée dans la société de nouveaux associés et d’écarter ceux dont la présence est, pour une raison quelconque, jugée non souhaitable. Il vise aussi, dans certains cas, à maintenir la répartition du capital telle qu’elle a été établie lors de la constitution de la société afin d’éviter un changement de majorité.

    L’agrément peut être d’origine légale, statutaire ou extrastatutaire.

    Il peut exister dans tous les types de sociétés.

    Il est de règle dans les sociétés dites fermées, c’est-à-dire dominées par l’intuitu personae (SARL, SNC, SCS), mais il se rencontre également dans les sociétés par actions où les titres sont en principe librement négociables.

    L’agrément est en outre plus ou moins coercitif selon le type de société et selon la qualité de l’acquéreur.

    Obligatoire dans les SNC, l’agrément est facultatif dans les SA et les SAS.

    La réglementation particulière à certaines SA peut imposer l’agrément des nouveaux actionnaires, par exemple :

    • – pour les sociétés exploitant une entreprise de presse,
    • – pour les sociétés exerçant certaines activités libérales lorsque ces sociétés peuvent revêtir la forme anonyme, notamment les sociétés de commissaires aux comptes ou d’architecture.

    Par ailleurs, un agrément préalable est exigé dans les sociétés d’exercice libéral à forme anonyme, en commandite par actions et par actions simplifiées.

    Domaine de l’agrément pour les cessions de titres

    Opérations concernées

    – Opérations soumises à agrément

    Le Code de commerce impose ou autorise l’agrément pour les cessions de parts ou d’actions, ce qui recouvre principalement la vente moyennant un prix.

    Dans les sociétés par actions, l’agrément peut être limité aux cessions de certains titres seulement.

    On se trouve alors en présence de deux catégories d’actions, les unes dont la cession est soumise à contrôle, les autres dont la cession est libre. La création de catégories d’actions permet ainsi de constituer, dans une certaine mesure, un « noyau dur » au sein de la société.

    Ces actions auxquelles sont attachés des droits non financiers sont qualifiées d’actions de préférence.

    Lorsqu’elle figure dans les statuts d’origine, la clause d’agrément est valable puisque, dans ce cas, tous les actionnaires l’ont acceptée en signant les statuts lors de la constitution de la société.

    Elle l’est aussi lorsqu’elle est introduite dans les statuts d’une SA en cours de vie sociale, sur décision d’une assemblée générale extraordinaire sans qu’il soit nécessaire de recueillir l’accord unanime des actionnaires, car elle ne constitue qu’une simple restriction des droits des actionnaires, laquelle ne peut, en soi, être considérée comme l’équivalent d’une augmentation de leurs engagements interdite par la loi.

    En conséquence, l’actionnaire auquel cette clause serait imposée ne serait pas fondé à la contester car elle ne porte pas atteinte à son droit de céder ses actions.

    Dans la SAS, la clause d’agrément des cessions d’actions, qui a pour objet de garantir la stabilité du capital de la SAS et la cohésion de son actionnariat, ne peut être adoptée ou modifiée en cours de vie sociale que par une décision prise collectivement par les associés dans les conditions et formes prévues par les statuts.

    Cependant, il est prudent de prévoir l’unanimité en cas de suppression de ces clauses.

    Dans une société dont les actions ne sont pas admises aux négociations sur un marché réglementé, la cession d’actions ou de valeurs mobilières donnant accès au capital, à quel que titre que ce soit, peut être soumise à l’agrément de la société par une clause des statuts.

    Les titres visés sont les actions ordinaires, les actions de préférence, les titres de créance et, à titre résiduel, les certificats d’investissement (émis jusqu’au 27 juin 2004 et survivants depuis).

    L’agrément ne peut être imposé que si les titres sont nominatifs en vertu de la loi ou des statuts.

    L’insertion d’une clause d’agrément dans les statuts doit faire l’objet de mesures de publicité avec insertion dans un journal d’annonces légales et dépôt au greffe.

    Ces mêmes formalités doivent être accomplies en cas de suppression d’une clause d’agrément existante, ainsi qu’en cas de modification de la clause.

     

    L’acquéreur d’actions nominatives n’a pas à justifier au jour de la cession de la propriété d’actions revêtant également la forme nominative. Sa qualité d’actionnaire peut résulter de la détention d’actions au porteur (Cass. com. 24-2-1987).

    L’agrément est nécessaire quel que soit le nombre de titres cédés.

    En cas de cession isolée de la nue-propriété, la procédure d’agrément qu’elle soit d’origine légale ou statutaire est donc applicable, étant rappelé qu’en cas de cession de la nue-propriété d’actions émises par une société anonyme, la clause d’agrément ne pourra jouer que si le tiers acquéreur n’est pas un descendant, un ascendant ou le conjoint du cédant.

    L’application de la procédure d’agrément en cas de cession de l’usufruit de parts ou actions est controversée, comme l’est l’attribution ou non de la qualité d’associé à l’usufruitier.

    La procédure d’agrément (légal ou conventionnel) doit être mise en œuvre en cas de vente par adjudication, dans le cadre d’une saisie, de droits d’associé et de valeurs mobilières non admises aux négociations sur un marché réglementé.

    Pour être opposables à l’adjudicataire, les conventions instituant un agrément doivent figurer dans le cahier des charges.

    Les observations sur le contenu du cahier des charges ne sont plus recevables à l’expiration d’un délai de deux mois courant à compter de la notification d’une copie du cahier des charges à la société.

    Lorsqu’elle intervient dans le cadre d’un plan de sauvegarde, la cession de droits sociaux est subordonnée, en l’absence de disposition contraire dans la loi, au respect de l’agrément, qu’il soit légal ou statutaire.

    En cas de cession des droits sociaux prévue dans le projet de plan ou dans le plan de redressement, les clauses d’agrément sont réputées non écrites.

    Ainsi, bien que conformes aux conditions requises, les clauses d’agrément sont écartées en cas d’admission de nouveaux actionnaires qui acceptent de participer à une augmentation de capital destinée à assurer le redressement judiciaire de la société.

    Les clauses d’agrément sont également écartées lorsque le tribunal ordonne la cession forcée de tout ou partie des actions des actionnaires qui se sont opposés à la modification du capital au profit des personnes qui se sont engagées à exécuter le projet de plan.

    La cession des parts ou des actions composant le capital de la société objet d’une liquidation judiciaire n’est pas envisagée, cette société ayant vocation à être dissoute. Est donc ici visée la cession des parts et actions que cette société détient dans une autre société. Aucune neutralisation de l’agrément légal ou statutaire n’étant prévue par les dispositions spécifiques à la liquidation judiciaire, celui-ci doit être demandé par les organes de la procédure collective auprès de la société émettrice.

    Lorsque la cession des titres d’un associé à un tiers intervient après la dissolution de la société et au cours de la procédure de liquidation, il y a lieu de respecter la procédure d’agrément, que celle-ci soit d’origine légale ou conventionnelle.

     

    – Opérations non soumises à agrément

    . Convention de croupier

    Il s’agit d’une convention par laquelle un associé convient de partager avec un tiers les bénéfices et les pertes résultant de sa participation dans la société, n’est pas en principe soumise à l’agrément de la société puisque le tiers (« le croupier ») n’a aucun rapport direct avec la société et qu’il ne peut exercer aucune des prérogatives attachées à la qualité d’associé.

    Attention toutefois, cette convention ne doit pas être utilisée pour tourner les dispositions légales ou statutaires concernant l’entrée dans la société de nouveaux associés.

    Il a ainsi été jugé que le contrat qui porte sur la majorité des parts d’une SNC et dont la durée est la même que celle de la société, tend, lorsque les droits du croupier sont beaucoup plus importants que ceux du titulaire des parts, vers une cession de ces parts et peut même constituer une cession déguisée, laquelle, faite sans le consentement des autres associés, est interdite (CA Paris 19-2-1979).

    . Cession de titres admis sur les marchés réglementés

    Les clauses d’agrément ne sont pas autorisées dans les sociétés dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé.

    . Prise de contrôle d’une société associée

    Lorsqu’une société a des associés personnes morales, toute prise de participation dans le capital d’un de ces associés permet l’entrée indirecte d’un tiers dans la société.

    Les dispositions du Code de commerce relatives à l’agrément dans les sociétés commerciales ne visent que les cessions intervenant directement dans la société.

    Une clause insérée dans les statuts d’une SARL prévoyant l’agrément des cessions indirectes a été jugée inefficace (T.com. Versailles 26-4-1989).

    Pour contester la validité d’une cession indirecte de titres, seule l’introduction dans les statuts de clauses dites d’exclusion ou de rachat forcé semble vraiment efficace. La Cour de cassation a d’ailleurs affirmé la validité de principe des clauses statutaires d’exclusion d’un actionnaire.

    La clause d’exclusion ou de rachat forcé doit définir sans ambiguïté la notion de contrôle.

    Si les statuts subordonnent la mesure à une décision collective, ils ne peuvent pas priver l’associé dont l’exclusion est envisagée de son droit de participer à cette décision et de voter sur la proposition (Cass. com. 23-10-2007 n° 06-10-2007).

    Les clauses d’exclusion en cas de changement de contrôle d’une société associée sont légalement autorisées dans les SAS.

     

    . Fusion ou scission de sociétés

    Les apports de droits sociaux effectués au titre d’une fusion ou d’une scission échappent en principe à la procédure d’agrément.

    Il a été jugé qu’en pareil cas, la transmission des parts est faite directement de la société ancienne à la société nouvelle par voie de dévolution de patrimoine ; elle ne peut donc pas être considérée comme une cession isolée faite à un tiers et, dès lors, ne doit pas être soumise aux formalités prévues pour de telles cessions (Cass. com. 19-4-1972 n° 69-14.054).

    Toutefois, en cas de transfert de parts de SNC, cette solution incontestable ne saurait permettre d’écarter l’obligation d’agréer la société absorbante ou nouvelle qui recueille les parts de la société car, même en cas de transmission universelle, le contrat de société et la qualité d’associé de SNC restent empreints d’un fort « intuitu personae » et ne peuvent être repris qu’avec l’accord du cocontractant.

    Une clause des statuts peut imposer l’agrément pour les transmissions de droits sociaux résultant d’une fusion, d’une scission.

    Aucun intérêt d’ordre public ne paraît, en effet, limiter la liberté pour les associés d’étendre la procédure d’agrément à des opérations autres que les cessions, mais qui, comme elles, se traduisent par l’entrée de nouveaux associés dans la société.

    La validité d’une telle clause a d’ailleurs été affirmée par la Cour de cassation à propos d’actions de sociétés anonymes (Cass. com. 3-6-1986 n° 85-12.657).

    La clause qui impose l’agrément pour les transmissions de droits sociaux résultant d’une fusion ou d’une scission doit être rédigée avec le plus grand soin, les juges interprétant souverainement le sens et la portée de toute clause ambiguë.

    À défaut de viser expressément ces opérations, il est conseillé de recourir à une expression telle que « transmission par quelque moyen que ce soit » (Cass. com. 6-5-2003) ou « transmission par tout moyen impliquant l’entrée d’un nouvel associé ».

     

    Personnes concernées

    Selon que les parts ou actions de sociétés commerciales sont cédées à des tiers, entre associés ou aux conjoints, ascendants et descendants, le Code de commerce peut imposer, autoriser ou exclure l’agrément.

    – Cessions à titre onéreux à des tiers

    Par « tiers », il faut entendre toute personne, physique ou morale, non associée au jour de la cession.

    Il peut s’agir notamment d’un ancien associé (Cass. com. 29-3-1955).

    Le Code de commerce impose que les cessions à des tiers de parts sociales de SARL et de SNC soient autorisées par les associés.

    Il en va de même en cas de cession de parts sociales de SCS, mais les statuts peuvent assouplir les règles de majorité applicables en cas de cession des parts d’un associé commanditaire ou d’une partie de celles appartenant à un associé commandité.

    Dans les SA, l’agrément statutaire n’est écarté qu’en cas de succession, de liquidation du régime matrimonial ou de cession soit à un conjoint, soit à un ascendant ou à un descendant.

    Une clause des statuts peut donc prévoir que la cession à un tiers d’actions est soumise à agrément, à condition que les titres revêtent la forme nominative.

    Le particularisme de la SCA conduit à distinguer la cession des titres des associés commandités qui obéissent aux règles fixées en matière de SCS, de la cession des actions des associés commanditaires qui suivent les règles édictées en matière de SA.

    Les statuts de la SAS peuvent soumettre les cessions d’actions à des tiers à agrément préalable de la société, le Code de commerce prévoyant cette faculté pour « toute cession ».

     

    – Cessions à titre onéreux entre associés ou actionnaires

    . SNC :

    Les cessions de parts entre associés doivent être autorisées par tous les associés. Cette règle est impérative et toute clause contraire est réputée non écrite.

    . SARL :

    Les parts sociales sont en principe librement cessibles entre associés.

    Cependant, afin de maintenir l’équilibre social existant et d’éviter une prise de contrôle par un groupe d’associés, les statuts peuvent limiter la libre cessibilité.

    . SA :

    Une clause d’agrément peut être prévue pour les cessions entre actionnaires, afin de maintenir un équilibre entre groupes d’actionnaires à l’intérieur d’une société.

    . SCA :

    En principe, les droits détenus par les commandités ne peuvent être cédés entre associés qu’avec le consentement de tous les associés.

    Toutefois, les statuts des SCA peuvent modifier cette règle et prévoir des modalités plus souples en cas de cession partielle des parts des associés commandités à un commanditaire.

    Les cessions entre associés des actions des commanditaires peuvent être soumises à agrément.

    . SAS :

    Les statuts peuvent soumettre à agrément les cessions, intervenant entre associés, afin de maintenir l’équilibre social.

    – Cessions au conjoint, aux ascendants et descendants

    . SNC :

    Le Code de commerce impose, par la généralité des termes utilisés, l’autorisation des associés pour toute cession au conjoint et aux ascendants et descendants.

     

    . SCS et SCA :

    En l’absence d’indication contraire dans le Code de commerce, les droits sociaux des associés commandités ne sont pas librement cessibles à leur conjoint et à leurs ascendants et descendants.

    Il en va de même pour les cessions de parts des associés commanditaires de SCS. En revanche, par identité de régime avec les SA, les clauses d’agrément ne sont pas applicables à la cession des actions des associés commanditaires de SCA.

    . SARL :

    Les parts sociales sont en principe librement cessibles entre conjoints et entre ascendants et descendants.

    Cette libre cessibilité dérogeant au principe d’ordre public de l’agrément des cessions à des tiers, doit être interprétée restrictivement.

    Elle ne saurait donc être étendue par les statuts à d’autres personnes que celles expressément visées.

    Sont ainsi exclus du champ d’application de cette disposition les concubins, frères ou sœurs, beaux-frères, belles-sœurs, beaux-parents ou neveux (CA Bordeaux 4-1-1961).

    Toutefois, les statuts peuvent stipuler que le conjoint, un ascendant ou un descendant ne peut devenir associé qu’après avoir été agréé dans les conditions prévues pour les cessions aux tiers.

    La clause statutaire doit également être interprétée restrictivement ; il a ainsi été jugé que la clause selon laquelle, en cas de décès d’un associé, la société continue entre les associés survivants et les héritiers et ayants-droit de l’associé décédé, lesquels ne sont pas soumis à l’agrément des associés survivants, dispense d’agrément le légataire d’un associé décédé (Cass. com. 5-4-2018 n° 16-18.097).

    Lorsque l’acquéreur possède déjà la qualité d’associé, l’agrément n’est en principe pas requis.

    La Cour de cassation a jugé, en effet, que la loi n’autorise une limitation statutaire à la libre transmissibilité des parts sociales par voie successorale que pour l’agrément des personnes qui ne sont pas déjà associées (Cass. com. 28-10-1974 n° 73-12.368).

    Cette solution doit être étendue aux cessions et donations entre vifs aux conjoints, ascendants ou descendants, situations également visées par la loi.

    Toutefois, l’accord des autres associés est, à notre avis, nécessaire si les statuts contiennent une clause limitant la libre cessibilité des parts entre associés, car il s’agit alors d’exercer un contrôle sur la répartition de ces parts.

    Or, la possibilité de ce contrôle est expressément prévue par le législateur pour toutes les cessions entre associés sans aucune distinction.

     

    . SA :

    La clause statutaire d’agrément est écartée en cas de cession à un conjoint, à un ascendant ou un descendant.

    Cette liste est limitative et une telle clause peut, par exemple, être opposée au gendre d’un actionnaire (CA Colmar 30-1-1970).

    En revanche, lorsqu’une SA, dont les actions ne sont pas admises aux négociations sur un marché réglementé, réserve des actions à ses salariés, les statuts peuvent prévoir une clause d’agrément en cas de cession à un conjoint, un ascendant ou un descendant dès lors que la clause a pour objet d’éviter que ces actions ne soient dévolues ou cédées à des personnes n’ayant pas la qualité de salarié de la société.

    . SAS :

    Dans une SAS, les statuts pouvant soumettre toute cession d’action à l’agrément, celui-ci peut valablement être étendu aux cessions au conjoint, à un ascendant ou un descendant.

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